Dans son arrêt du 11 décembre 2020, que La Cour internationale de Justice (CIJ),’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris n’a jamais acquis le statut de «locaux de la mission» de la Guinée équatoriale en France au sens de l’alinéa (i) de l’article premier de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques et que la France n’a pas manqué aux obligations qui lui incombent au titre de ladite convention.
LA HAYE, le 11 décembre 2020. La Cour internationale de Justice (CIJ), organe judiciaire principal de l’Organisation des Nations Unies, a rendu ce jour son arrêt sur le fond de l’affaire relative aux Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France).
Dans son arrêt, qui est définitif, sans recours et obligatoire pour les Parties, la Cour :

1) Dit, par neuf voix contre sept, que l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris n’a jamais acquis le
statut de «locaux de la mission» de la République de Guinée équatoriale en République française
au sens de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques (la «convention de Vienne») ;

2) Déclare, par douze voix contre quatre, que la République française n’a pas manqué aux obligations qui lui incombent au titre de la convention de Vienne ;

3) Rejette, par douze voix contre quatre, le surplus des conclusions de la République de Guinée équatoriale.
Avant d’arriver à cette décision, la Cour relève que les Parties divergent sur la question de savoir si l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris fait partie des locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale en France et peut donc bénéficier du traitement prévu à l’article 22 de la convention de Vienne.

Les Parties s’opposent aussi sur la question de savoir si les mesures prises par les autorités françaises à l’égard de cet immeuble méconnaissent les obligations de la France en vertu dudit article.

La Cour commence par examiner les circonstances dans lesquelles un bien acquiert le statut de «locaux de la mission» au sens de l’alinéa (i) de l’article premier de la convention de Vienne.

A cet égard, elle estime que ladite convention ne peut être interprétée comme autorisant un Etat accréditant à imposer unilatéralement son choix de locaux de la mission à l’Etat accréditaire lorsque ce dernier a objecté à ce choix.

La Cour considère qu’une telle objection doit être communiquée en temps voulu et ne doit pas être arbitraire. De plus, elle ne doit pas avoir un caractère discriminatoire.

Dès lors, si l’Etat accréditaire objecte à la désignation par l’Etat accréditant d’un certain bien comme faisant partie des locaux de sa mission diplomatique, et si cette objection est communiquée en temps voulu et n’a un caractère ni arbitraire ni discriminatoire, ce bien n’acquiert pas le statut de «locaux de la mission» et ne bénéficie donc pas de la protection prévue à l’article 22 de la convention.

La question de savoir s’il a été satisfait aux critères mentionnés ci-dessus doit être appréciée dans les circonstances propres à chaque affaire.

La Cour procède donc à l’examen de la question de savoir si, au vu des faits portés à sa connaissance en la présente affaire, la France a objecté à la désignation de l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris comme locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale et, dans l’affirmative, si une telle objection a été communiquée en temps voulu et n’avait un caractère ni arbitraire ni discriminatoire.

Elle commence par se pencher sur les échanges diplomatiques des Parties intervenus entre le 4 octobre 2011, date à laquelle la Guinée équatoriale a pour la première fois informé la France qu’«il s’agi[ssai]t des locaux de la [m]ission [d]iplomatique», et le 6 août 2012, peu après la «saisie pénale immobilière» de l’immeuble par les autorités françaises ordonnée le 19 juillet 2012. La Cour considère que les faits relatés montrent que, pendant cette période, la France a constamment objecté à la désignation de l’immeuble concerné comme faisant partie des locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale.

S’agissant de la question de savoir si l’objection de la France a été communiquée en temps voulu, la Cour note que la France a communiqué sans délai son objection à la désignation de l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris comme locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale après la notification du 4 octobre 2011. La France a par la suite constamment objecté à chaque assertion de la Guinée équatoriale voulant que cet immeuble constituât les locaux de sa mission diplomatique, et a maintenu son objection à ce qu’il fût désigné comme tel.

La Cour considère que, dans les circonstances de la présente affaire, la France a objecté en temps voulu à la désignation, par la Guinée équatoriale, de l’immeuble comme locaux de sa mission diplomatique.

Quant à la question de savoir si l’objection de la France n’avait un caractère ni arbitraire ni discriminatoire, la Cour conclut qu’il existait des motifs raisonnables pour que la France objectât à la désignation par la Guinée équatoriale de l’immeuble comme locaux de sa mission diplomatique, qui étaient connus ou auraient dû être connus de la Guinée équatoriale.

A la lumière de ces motifs, la Cour ne considère pas que l’objection de la France avait un caractère arbitraire.

En outre, la Guinée équatoriale n’a pas démontré que la France, en objectant à la désignation, a agi de manière discriminatoire. En conséquence, la Cour estime que la France a objecté à la désignation par la Guinée équatoriale de l’immeuble comme locaux de sa mission diplomatique en temps voulu et que cette objection n’avait un caractère ni arbitraire ni discriminatoire.

Pour ces motifs, la Cour conclut que l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris n’a jamais acquis le statut de «locaux de la mission» au titre de la convention de Vienne, et déclare que les actes dont la Guinée équatoriale tire grief ne peuvent donc constituer un manquement de la France aux obligations que lui fait cette convention.

En conséquence, la Cour conclut qu’elle ne peut faire droit aux demandes de la Guinée équatoriale la priant de dire que la France est tenue de lui fournir réparation pour le préjudice causé et tendant à ce qu’elle déclare que la France est tenue de reconnaître à l’immeuble le statut de locaux de la mission diplomatique équato-guinéenne.

Historique de la procédure
Pour connaître l’historique de la procédure, il convient de consulter les communiqués de presse
nos 2016/18, 2016/28, 2016/38, 2018/24 et 2020/34, disponibles sur le site Internet de la Cour
(www.icj-cij.org).
Composition de la Cour
La Cour était composée comme suit : M. Yusuf, président ; Mme Xue, vice-présidente ; MM. Tomka, Abraham, Bennouna, Cançado Trindade, Mme Donoghue, M. Gaja, Mme Sebutinde,
MM. Bhandari, Robinson, Crawford, Gevorgian, Salam, Iwasawa, juges ; M. Kateka, juge ad hoc ; M. Gautier, greffier.
M. le juge YUSUF, président, joint à l’arrêt l’exposé de son opinion individuelle ; Mme la juge XUE, vice-présidente, joint à l’arrêt l’exposé de son opinion dissidente ; M. le juge GAJA joint une déclaration à l’arrêt, Mme la juge SEBUTINDE joint à l’arrêt l’exposé de son opinion individuelle, MM. les juges BHANDARI et ROBINSON joignent à l’arrêt les exposés de
leur opinion dissidente ; M. le juge ad hoc KATEKA joint à l’arrêt l’exposé de son opinion dissidente.
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Un résumé de l’arrêt figure dans le document intitulé «Résumé 2020/4», auquel sont annexés des résumés des opinions et déclaration. Le présent communiqué de presse, le résumé de l’arrêt, ainsi que le texte intégral de celui-ci sont disponibles sur le site Internet de la Cour (www.icj-cij.org) sous
la rubrique «Affaires».
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Remarque : Les communiqués de presse de la Cour sont établis par son Greffe à des fins d’information uniquement et ne constituent pas des documents officiels.
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La Cour internationale de Justice (CIJ) est l’organe judiciaire principal de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Elle a été instituée en juin 1945 par la Charte des Nations Unies et a entamé ses activités en avril 1946. La Cour est composée de 15 juges, élus pour un mandat de neuf ans par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité des Nations Unies. Elle a son siège au Palais de la Paix, à La Haye (Pays-Bas). La Cour a une double mission, consistant, d’une part, à régler conformément au droit international, par des arrêts qui ont force obligatoire pour les parties concernées et sont sans appel, les différends d’ordre juridique qui lui sont soumis par les Etats et, d’autre part, à donner des avis consultatifs sur les questions juridiques qui peuvent lui être soumises par les organes de l’ONU et les institutions du système dûment autorisées à le faire.
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Département de l’information :
M. Andreï Poskakoukhine, premier secrétaire de la Cour, chef du département (+31 (0)70 302 2336) ;
Mme Joanne Moore, attachée d’information (+31 (0)70 302 2337) ;
M. Avo Sevag Garabet, attaché d’information adjoint (+31 (0)70 302 2394)
Mme Genoveva Madurga, assistante administrative (+31 (0)70 302 2396)