«Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs, l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis…» RENAN Ernest., Qu’est –ce qu’une nation?, 1882.

La seule alternative à la  violence, à la guerre des uns contre les autres, à l’instrumentalisation des passions politiques, c’est de convaincre les membres de la communauté nationale que, si la discorde est inévitable, la recherche de l’unité  et de la cohésion est tout aussi nécessaire.

Sans doute, l’unité nationale n’est pas acquise dans notre pays, probablement, ont peut être d’accord sur ce constat peu rassurant pour l’avenir de notre pays.

Les pouvoirs publics, ont acté l’existence d’un problème en créant un ministère qui  penchera sur la citoyenneté et l’unité nationale. Mais, la création d’un ministère sans une politique publique globale,  ne servira à rien. C’est pourquoi dans cette réflexion, je veux faire des propositions concrètes pour la construction de notre nation, une nation qui sera  unie, et qui regardera ensemble vers un avenir commun.

Le concept de construction est essentiel, car, une nation ne se décrète pas, elle se construit dans la longue durée.  Donc, pour arriver à une unité nationale, il faut nécessairement passer par le processus de  construction national. Dans le cas de la Guinée, cela passera par la mise en place d’une politique publique forte et ambitieuse: C’est sont entre autres, la refonte d’une école moderne, tout en repensant notre histoire, et instaurer une politique culturelle sérieuse, il s’agit de changer le fonctionnement de nos institutions politiques et sociales.

L’école comme lieu de diffusion et d’inculcation d’une identité nationale

Il ne s’agit pas ici de revenir sur toutes les fonctions de l’école. Mais, de défendre, une idée selon laquelle, l’école peut être un vecteur de l’unité nationale, et de concorde entre une population donnée.

L’école est la première base d’une construction de l’identité nationale. Donc, de l’unité nationale.  C’est par cette institution que toute société passe pour développer des valeurs communes, de vivre ensemble. L’école n’est pas seulement un instrument de connaissance. Elle est aussi au centre de développement humain. Elle doit être un outil de réflexion, pour bâtir une société juste et équilibrée.

L’école n’est pas seulement un cadre physique fait de bâtiments, de mobiliers et d’équipement en matériels didactiques, mais plutôt une entité humaine d’adultes et d’âmes jeunes, réunis autour d’un idéal commun, à savoir l’atteinte d’un ensemble  de finalité éducative préalablement définie selon le projet de société que l’autorité politique a l’ambition de réaliser. Certains me diront il s’agit là la conception de Louis Althusser. C’est-à- dire l’idée selon laquelle, l’école est  un instrument idéologique de l’État. Sans doute, c’est une réalité, tous les États du monde modèles leurs programmes scolaires selon la société qu’ils souhaitent construire.

Dans le cas de notre pays, la Guinée, l’école doit s’atteler à la construction de l’unité nationale. Pas en chantant démagogiquement, « la guinée, est une famille». Mais en mettant en place un enseignement sérieux sur l’unité nationale. Cela passe nécessairement par la création et la mise en place d’un programme scolaire et universitaire. Donc, il faut instituer un groupe d’expert guinéens, notamment des sociologues,  des historiens, des géographes,… qui vont  s’atteler à élaborer un programme ambitieux sur l’unité nationale. Et ce programme devrait être enseigné de l’école maternelle jusqu’à l’université.

Parmi les enseignements fondamentaux, pour la construction d’une unité nationale, l’histoire reste la discipline la plus incontournable.

L’histoire, une discipline déterminante pour toute construction nationale,

Le processus de la construction d’une  nation unie, passe par l’enseignement d’une histoire commune. Toutes les nations ont une ou des histoires. Des histoires écrites par les hommes de ces nations. Pour le cas de la Guinée, il faut regarder lucidement l’histoire guinéenne, et la revisitée dans sa complexité sans complaisance. Là aussi, les intellectuels, notamment les historiens, ont leurs rôles à jouer. Si dans l’immensité des intellectuels guinéens, on reste incapable de retracer l’histoire nationale, c’est sans doute un échec national. A l’état actuel de l’histoire guinéenne, elle reste méconnue par la majeure partie de la population, y compris, les étudiants diplômés en Histoire, la raison est tout simple, l’histoire du pays ne pas sérieusement enseigner dans le cursus scolaire et universitaire.

Donc, au regard de ce constat lamentable, nous proposons de mettre en place l’enseignement de l’histoire dans deux perspectives:

1 -D’abord la mise en place d’un programme, qu’on appellera, l’histoire scientifique. Ce volet d’enseignement d’histoire doit se baser sur le caractère scientifique de l’histoire, la pertinence de l’enseignement de l’histoire, ses objectifs scientifiques, la  socio- histoire de l’ordre politique guinéenne, l’histoire constitutionnelle de la Guinée… Bref, ce volet se consacrera essentiellement sur la dimension scientifique de l’histoire de notre pays. Ici, l’objectif est de reconstruire l’histoire politique et administrative de notre pays.

2- Ensuite, dans un deuxième volet, s’attaquer à l’enseignement de l’histoire de la Guinée, dans la longue durée. Dans cet enseignement historique, il faut mettre l’accent sur ce que j’appelle l’enseignement du roman national. Dans ce roman national, il faut reconstruire l’histoire sociale de la Guinée, l’histoire des ethnies, leurs itinéraires, leurs cultures, pour trouver des usages communs. une histoires communes, en vu de donner les nouvelles générations la volonté de vivre ensemble. L’objectif ici, c’est la construction d’un imaginaire collectif, et un mythe  national au tour de l’unité de la nation.

Pour cela, les facteurs culturels sont incontournable, pour le processus de la construction d’une mythologie nationale.

Mise en place d’une politique culturelle,

   La politique culturelle est un champ essentiel pour la promotion et la dynamisation de la construction nationale. Le concept de culture est saisi ici au sens large. C’est sont notamment, la littérature, les symboles de la république, l’art, la légende, le conte,la musique, le proverbe, le cinéma…

L’ensemble de ces éléments constitueront une base solide, pour mettre en valeur l’histoire culturelle de la Guinée. Tout l’État qui souhaite construire une nation, doit solidifier son encrage culturel.  Aujourd’hui l’ensemble des éléments culturels et traditionnels, que nous avons cités en début de cette partie sont disparue. Et donc, la nouvelle génération n’a pas une culture solide. Donc, il faut reconstruire en profondeur nos anciens usages. En mettant en valeur, la littérature sur la Guinée. Il s’agit d’enseigner systématiquement par exemple, le conte, la légende, et mettre en valeur nos ancêtres, et pour cela il faut travailler à créer des ancêtres commun, car, ils existent, peut être dans un passé lointain.

Il faut instituer une caravane culturelle et pédagogique dans le cursus scolaire, il s’agit là, de mettre en place un programme rigoureux sur ce que j’appelle le voyage scolaire et interculturel dans toutes les régions et préfectures de la Guinée. L’idée, c’est de faire découvrir les jeunes élevés dés le collège la culture et la façon de vivre de ses compatriotes. L’idée est de généraliser ces voyages scolaire et interculturel partout dans le pays.

L’objectif recherché ici est double: d’abord pédagogique, car les élèves, vont changer l’air et apprendre beaucoup de choses dans leurs voyages. Ensuite, stratégique pour l’unité nationale, car cela créera  des liens fort, et donc favorisera l’unité nationale.

Pour que les gens s’aiment, il faut créer un destin national commun. Pour cela, il faut inculquer un sentiment d’appartenance nationale. Ce sentiment d’appartenance nationale est la condition incontournable pour l’unité de toute nation. Il se traduit par une culture commune,  une langue et une histoire commune.

Dans le sillage de la construction d’une nation, les religions peuvent, elles aussi jouées un rôle important.

Les religions en tant que source  et facteur de l’unité nationale,

Toutes les religions contribuent au développement humain et social. Les religions mettent en valeur trois éléments fondamentaux. Trois éléments qui sont essentiel à toute collectivité humaine.

En premier lieu, les religions peuvent enrichir la compréhension de la nature humaine. Elles tiennent compte de la noblesse et de la sûreté humaine. Elles remettent l’Homme au dessus de toute chose.

En deuxième lieu, la solidarité et la fraternité est au centre de toutes les religions. Face à la fragmentation de la société, les religions peuvent jouer ce rôle de l’unité en cultivant la solidarité, l’unité et l’unicité de la famille humaine.

En troisième et dernier lieu, la justice est le caractère commun de toutes les religions, c’est pourquoi, elles peuvent de façon très solide participée, à l’unité de la nation. Car, l’unité de toute nation se repose sur la force et la capacité de faire valoir sa justice. Et les religions encouragent fortement sur l’équité et la justice.

L’histoire montre que les religions sont un moteur majeur pour la construction nationale. Elles constituent une base solide pour le processus et la diffusion des valeurs aboutissant, à l’unité nationale. Dans notre cas ici, il ne s’agit pas de dire, telle religion est plus importante que l’autre.

L’idée que nous défendons, est simple: toutes les religions sont un vecteur de paix et de l’unité nationale.

La Guinée est un pays particulièrement croyant, donc, toutes ces croyances peuvent concourir à l’unité de notre nation. Que sa soit l’islam, ou le christianisme, la paix et la cohésion est au centre de ces religions. D’ailleurs; les religions ont jouées un rôle déterminant en Guinée, pour les négociations et la stabilité politique. Elles peuvent faire mieux aujourd’hui pour l’unité de notre pays.

L’État en tant qu’institution politique et une organisation sociale, doit se protéger, et pour cela, l’armée doit jouer ce rôle de protection, mais peut aussi garantir le processus de la construction nationale de notre pays. Nous recourons ici le terme de l’armée au sens générale, ça inclut toutes les forces de défense et de sécurité.

L’armée comme lieu de diffusion et d’inculcation d’une identité nationale,

L’armée doit non seulement défendre le territoire contre toute agression extérieure, mais doit aussi accroître le patriotisme. L’armée guinéenne est tribale, cela  a largement contribué  à la fracture de notre pays.

L’armée nationale peut conduire à l’unité nationale, si le recrutement  se fasse dans la rigueur et dans la transparence. Elle doit être un cadre de socialisation et l’enseignement de l’amour de la patrie.

Pour inculquer à la nouvelle génération au patriotisme, nous proposons que tous élèves qui a son baccalauréat fasse un service militaire d’un mois dans une caserne, pour non seulement découvrir l’institution de la défense, mais aussi apprendre le patriotisme, et les valeurs de la paix. Il s’agit pas ici d’enseigner comment utiliser un kalachnikov, mais plutôt enseigner une socialisation républicaine. Enseigner l’amour de la patrie est une nécessité forte pour l’unité de notre pays. Et aussi tisser un lien avec nos forces de défense et de sécurité. Cela contribuera à pacifier la société et donc de la construction de notre nation.

L’État en tant qu’institution politique et une organisation administrative, doit former des agents de l’État, pour maintenir sa vie et sa pérennité.

Les  serviteurs de l’État, et des élections transparentes  sont des facteurs de l’unité nationale.

L’État doit avoir des hommes et des femmes en son sein pour garantir sa bonne marche. Ils ont la mission d’assurer l’intérêt général. C’est sont ces hommes et femmes que j’appelle les serviteurs de l’État. Ils doivent être recrutés dans une condition transparente absolue, en passant par  le concours. Et surtout, pas, par les concours absurde où on triche les vrais gagnant.

Pour garantir l’unité nationale, ces serviteurs de L’État doivent être neutres et impartial, et ils doivent être de façon exclusive au service de L’État, et non au service d’un intérêt particulier. Et ils doivent traiter  tous les citoyens à la même façon, et cela créera forcément un sentiment d’appartenance nationale. Si tous les citoyens du pays sont traités au même pied d’égalité dans les services de l’État., on passera à l’unité nationale. Car toute la population se sentira inclus dans la société, et du moment où il existe une égalité  de traitement devant les services de l’État, l’unité finira par s’imposer.

Ces serviteurs de l’État doivent avoir les caractéristiques suivantes:

-Des serviteurs de l’État dotés d’une compétence définie et dont la moralité est irréprochable. Moralité absolue, et qui résistent a toute forme de corruption. Ils doivent être au dessus de tout soupçon.

-Des serviteurs de l’État loyal. La loyauté est la caractéristique fondamentale de tout fonctionnaire de l’État. Ils doivent être loyal envers les institutions et non envers une personne. Ils doivent servir l’État et non le chef de l’État.

-Ces serviteurs n’obéissent qu’aux devoirs «objectifs» de leur fonction,

-Tout fonctionnaire doit agir au sein d’une hiérarchie,

-Ils doivent être enrôlés à la suite d’une sélection ouverte.

 

Les élections frauduleuses sont un facteur d’instabilité et des crises profondes dans les États africains. Pour pérenniser la stabilité et garantir une unité nationale durable, il faut des élections transparentes et qui ne souffre aucune manœuvre frauduleuse. On n’aura jamais l’unité dans le vol des suffrages des citoyens. Dans un État sérieux, ces serviteurs dont nous évoquions assurent les élections transparentes, car, ils bénéficient d’une moralité exceptionnelle et ils se placent au dessus de tout soupçon. Sans cela on ne s’en sortira pas. Et une élection truquée déclenche toujours l’instabilité et le désordre national. Les conflits post électoraux de la côte d’ivoire, et de Kenya sont des exemples illustratifs.

Le jour où, on tiendra des élections incontestables du fait de sa transparence, le pays s’en sortira unie, car, chaque citoyen pourra prétendre à un poste électif et le devenir, donc, ça renforcera inéluctablement la cohésion nationale.

Remarques conclusives

Au terme de cette courte réflexion, quelques constats s’imposent:

En premier lieu, une nation unie est forcément le fruit d’un processus et d’une construction. C’est les hommes qui construisent une nation. L’existence des éléments constitutifs de l’État ne traduit pas forcément l’existence d’une nation unie tournée vers un avenir commun.

En deuxième lieu, le processus de la construction nationale se matérialise par la mise en place des politiques publiques visant à créer le sentiment d’appartenance nationale et la solidarité nationale. Un peuple se définit par des principes politiques qu’elles mettent en commun.

En troisième lieu, On ne pourra pas faire l’économie de l’interdisciplinarité pour construire l’unité et le sentiment appartenance de notre pays. Il faut faire appelle à toutes les disciplines scientifiques pour aboutir à une unité durable et solide.

Donc, il revient au chef de l’État et de son gouvernement, d’engager une véritable politique publique sérieuse, bien réfléchie, pour l’unité nationale. Pas en créant des commissions qui ne serviront absolument à rien. L’État a responsabilité historique de définir l’avenir commun de notre pays. Pour le moment, rien ne fait dans ce sens. Mais, il est temps de rattraper le retard.

Il revient aussi aux partis politiques revendiquant de l’opposition, de penser à une politique alternative pour l’unité de notre pays. Là aussi, le constat est le même, aucun partis politique d’opposition n’à présenter une politique ambitieuse dans son programme, pour l’unité nationale. A eux de jouer, leurs véritable rôle, de contre pouvoir et des propositions crédibles.

A la société civile dans sa grande diversité, de faire de propositions, le rôle des enseignants chercheurs, de nos intellectuels sont crucial, dans ce vaste projet d’unité nationale. De promouvoir la paix et l’unité. Et inciter à tous les citoyens de s’impliquer pour la cause nationale.

 En fin, la fraternité et l’égalité constituent une base solide pour aller vers la cohésion nationale. Ils se reposent sur le partage, l’éducation, discussion, compromis, tolérance …

La fraternité est une quête, un travail sur soi en vue de l’autre, un bien à rechercher sans rien à attendre d’autre que la conviction de faire ce qui est nécessaire. L’appartenance à une cité commune implique que chacune se convainque qu’elle ne peut vivre durablement dans la violence. Que l’éclatement d’une communauté, quand le lien social se défait, est une défaite pour tous  et un gâchis immense. Être «frères», ce n’est pas nécessairement être d’accord sur tout, c’est refuser de se considérer comme des «ennemis».

Bah Elhadj Oumar (ebah580@yahoo.com).

Analyste et consultant politique, Diplômé à l’université de Nice.